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« Les courtiers en épargne collective, leurs dirigeants et leurs représentants sont-ils à l'abri de sanctions disciplinaires au Québec? »

Résumé  :

Les courtiers en épargne collective, leurs dirigeantset leurs représentants

sont-ils à l’abri de sanctions disciplinaires au Québec?

Sommaire

Mise en contexte

Au cours des vingt dernières années, l’industrie des fonds d’investissement a connu une croissance phénoménale au Québec, comme ailleurs au Canada. Dans le but de combler leurs besoins de consommation et d’assurer leur sécurité financière à la retraite, un nombre considérable de consommateurs se tournent, en effet, vers ce type de placement pour faire fructifier leurs épargnes. Dans ce domaine d’activité en pleine expansion, les services de courtage avec conseil offerts par les courtiers en épargne collective et leurs représentants prennent une importance capitale. Malgré la popularité de ces services, ces derniers ne sont pas sans risque pour les consommateurs ; comme le montre le scandale Norbourg, ils peuvent être confrontés au risque de fraude, de détournement de fonds, d’incompétence ou de négligence. Face à ce risque et aux enjeux majeurs que soulève la prévention des comportements déviants dans le secteur des services d’investissement, incluant les services de courtage, le Groupe de recherche en droit des services financiers de la Faculté de droit de l’Université Laval a entrepris un important programme de recherche dirigé par la professeure Raymonde Crête. Ce programme subventionné par l’Autorité des marchés financiers a pour objectif d’évaluer les régimes de sanctions civiles, pénales, criminelles et disciplinaires applicables aux prestataires de services d’investissement au regard de la fonction préventive de ces régimes. Le présent article s’inscrit dans le cadre de ce programme de recherche.

Objectifs

Cet article vise à analyser et à évaluer de manière critique les régimes de sanctions disciplinaires dans l’industrie de l’épargne collective, soit ceux applicables aux courtiers en épargne collective, à leurs dirigeants et à leurs représentants. Dans cette perspective, cet article fait ressortir les points saillants de cet encadrement disciplinaire, tant sur le plan théorique que pratique, en vue de déterminer s’il peut contribuer à prévenir les comportements déviants des acteurs du courtage en épargne collective. En outre, cet article cherche à déterminer si les acteurs en épargne collective au Québec bénéficient d’une immunité légale ou de facto, comparativement à leurs homologues ailleurs au Canada.

Aux fins de cette recherche, les auteurs ont analysé des décisions rendues en matière disciplinaire par des autorités d’encadrement au Québec et ailleurs au Canada, de janvier 2005 à la mi-septembre 2011. On y recense les décisions de l’Autorité des marchés financiers (AMF), du Bureau de décision et de révision (BDR), de la Chambre de la sécurité financière (CSF) et de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM).

L’article se divise en quatre parties. La première explique les fondements théoriques et conceptuels de l’encadrement des prestataires de services d’investissement. La deuxième partie décrit les acteurs et l’encadrement du courtage en épargne collective au Québec et ailleurs au Canada. La troisième partie examine les sanctions disciplinaires imposées à ces acteurs de 2005 à 2011. Enfin, à la lumière du portrait théorique et pratique dressé dans les parties précédentes, la quatrième partie soumet une réflexion d’ensemble sur l’encadrement disciplinaire des acteurs en matière de courtage en épargne collective.

Partie I – Fondements théoriques et conceptuels de l’encadrement disciplinaire des prestataires de services d’investissement

La relation entre le client et le prestataire de services d’investissement, incluant les acteurs du courtage en épargne collective, se distingue de celle dans les contrats commerciaux traditionnels parce qu’elle suscite un degré de confiance plus élevé de la part du client. Cette confiance accrue apparaît dans une relation que l’on considère comme étant de nature « fiduciaire » (entendu au sens large) et professionnelle. Plus particulièrement, cette relation implique une délégation de pouvoir du client envers le prestataire et un engagement ce dernier à agir dans l’intérêt du client. De manière générale, le client est placé en position de dépendance et de vulnérabilité n’ayant ni la connaissance, ni l’expérience pour agir lui-même ou pour surveiller le prestataire de services d’investissement. Cette situation place le client à risque de subir un préjudice et justifie en conséquence l’imposition d’un encadrement strict aux prestataires de services d’investissement. Cet encadrement strict comprend notamment un contrôle du droit de pratique, une intensification des normes de conduite et des mécanismes de surveillance et de contrôle spécifiques en cas de manquement. Ces derniers incluent un vaste éventail de sanctions découlant des régimes civil, administratif, disciplinaire, pénal et criminel.

En se fondant sur des études en droit, en science économique, en psychologie sociale et en criminologie, les auteurs considèrent que ces régimes de sanctions peuvent exercer une fonction préventive. Sous cet angle, ils estiment que les régimes de sanctions peuvent non seulement comporter un effet dissuasif, mais exercer également une fonction pédagogique importante en guidant et en incitant les personnes assujetties à agir de manière proactive pour minimiser les risques de comportements déviants, notamment par la mise en place de bonnes pratiques de gestion et de mécanismes internes de surveillance et de contrôle par la direction des entreprises de services d’investissement. Toutefois, ils conviennent que l’efficacité de la fonction préventive des régimes de sanctions dépend non seulement du contenu de la réglementation, mais également de son application par les autorités d’encadrement.

Dans le contexte du régime disciplinaire, les auteurs soumettent l’hypothèse selon laquelle une absence ou un faible nombre de plaintes disciplinaires ou encore l’imposition de sanctions trop clémentes par les autorités d’encadrement à l’égard des acteurs du courtage en épargne collective risque ne pas inciter ces derniers à faire preuve de professionnalisme dans l’exercice de leurs activités, et conséquemment, entraîner un préjudice pour les consommateurs.

Partie II – Les acteurs et l’encadrement du courtage en épargne collective

Trois principaux types d’acteurs interviennent dans la prestation des services de courtage en épargne collective, soit le courtier, les membres de la direction et les représentants. Les courtiers en épargne collective sont des entreprises généralement exploitées sous la forme de société par actions ou de société de personnes. Elles exercent leurs activités par le biais de personnes physiques que l’on désigne par le terme « représentants ». Au Québec, pour exercer des activités de courtage en épargne collective, l’entreprise doit s’inscrire auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Ailleurs au Canada, elles sont tenues de s’inscrire à titre de courtiers en épargne collective auprès de l’autorité en valeurs mobilières compétente et doivent, de plus, être membres de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM). Quant à la personne physique qui désire agir comme représentant de courtier au Québec, elle doit s’inscrire auprès de l’AMF et être membre de la Chambre de la sécurité financière (CSF). Ailleurs au Canada, elle doit s’inscrire auprès de l’autorité en valeurs mobilières compétente et être reconnue comme une « personne autorisée » par l’ACMF. Pour les dirigeants, depuis la réforme du régime d’inscription entrée en vigueur en 2009, ceux qui agissent spécifiquement comme « personne désignée responsable » ou comme « chef de la conformité » sont également tenus de s’inscrire à ce titre auprès de l’autorité en valeurs mobilières compétente, tant au Québec qu’ailleurs au Canada. Au Québec, pour les dirigeants n’exerçant pas l’une de ces fonctions, il n’y a aucune obligation de s’inscrire à un organisme de surveillance. Ailleurs au Canada, tous les dirigeants, incluant la « personne désignée responsable » et le « chef de la conformité », doivent être inscrits comme une « personne autorisée » au sens de la réglementation de l’ACFM.

Au Québec, l’AMF détermine les conditions que doivent remplir les acteurs du courtage en épargne collective et les règles concernant leurs activités. Elle assume également des responsabilités de surveillance, d’inspection, d’enquête et de sanction. Le Bureau de décision et de révision (BDR) agit comme tribunal administratif de première instance. Depuis 2009, celui-ci, à la demande de l’AMF, impose les sanctions disciplinaires à l’encontre des courtiers, de leurs représentants et des dirigeants exerçant la fonction de « personne désignée responsable » ou de « chef de la conformité ». Avant 2009, ce rôle relevait de l’AMF. Quant à la CSF, il s’agit d’un organisme d’autoréglementation responsable de la surveillance et du contrôle du respect des normes de conduite des représentants de courtier en épargne collective exerçant au Québec. Elle n’encadre que les représentants (personne physique) et non les courtiers en épargne collective (entreprise) ou ses dirigeants, à moins que ces derniers agissent également à titre de représentant. Ailleurs au Canada, l’ACFM est l’autorité principale en matière de sanctions disciplinaires dans le courtage en épargne collective. Outre son pouvoir envers les courtiers, l’ACFM peut intervenir en matière disciplinaire auprès de toute personne physique inscrite comme « personne autorisée », ce qui inclut tant les représentants que les dirigeants des courtiers en épargne collective.  

Contrairement au reste du Canada, on constate que les courtiers en épargne collective exerçant au Québec n’ont pas l’obligation d’être membre d’un organisme d’autoréglementation. Il en résulte une absence d’un encadrement propre et de règles disciplinaires qui leur sont applicables de façon distincte. De plus, les pouvoirs de sanction exercés par l’ACFM à l’égard des courtiers sont plus étendus que ceux exercés par le BDR ou l’AMF. Toutefois, les représentants en épargne collective au Québec bénéficient d’un encadrement disciplinaire plus précis et étoffé que les autres acteurs en épargne collective oeuvrant au Québec.

Ces distinctions permettent de conclure qu’il existe au Québec un encadrement moins étendu et moins strict pour les courtiers et leurs dirigeants que celui applicable à leurs homologues ailleurs au Canada, en raison notamment de l’absence d’organisme d’autoréglementation dévolu à ces acteurs. Il en est, toutefois, autrement pour les représentants en épargne collective au Québec. Malgré les pouvoirs moins étendus des autorités québécoises, ces derniers bénéficient d’un encadrement disciplinaire plus précis que celui des courtiers et des dirigeants québécois. Cet encadrement se rapproche, à peu de choses près, à celui de leurs homologues ailleurs au Canada.

Partie III – Les sanctions disciplinaires imposées aux acteurs du courtage en épargne collective

En vue de faire ressortir les points saillants de l’application de l’encadrement disciplinaire précédemment décrit, les auteurs ont procédé à une étude empirique des décisions rendues en matière disciplinaire par les autorités d’encadrement, soit celles rendues par l’AMF, le BDR, la CSF et par l’ACFM, pour la période de 2005 à 2011. Selon une approche comparative, les sanctions disciplinaires retenues aux fins de l’analyse sont présentées en fonction de type d’acteur visé et du cadre légal applicable.

Au Québec, onze décisions portant sur les sanctions imposées aux courtiers en épargne collective ont été rendues par l’AMF ou le BDR. La plus haute amende imposée a été de 50 000$, alors que les autres amendes varient entre 500$ et 10 000$. Pour ce qui est des autres sanctions, un blâme, deux radiations permanentes et une radiation temporaire ont été rendus. Quant aux dirigeants, seulement quatre décisions leur imposant des sanctions ont été rendues, une par l’AMF et trois par la CSF. Ces décisions ont mené à trois radiations permanentes, une radiation temporaire, deux ordonnances de publication et une obligation de suivre une formation. Enfin, 89 décisions portant sur les sanctions imposées aux représentants de courtiers ont été rendues, 11 par l’AMF et 78 par la CSF. De ces décisions, six ont mené à un blâme, 17 à une amende de moins de 10 000$, 13 à une amende à plus de 10 000$, 20 à une radiation permanente, 49 à une radiation temporaire, 44 à une ordonnance de publication, huit à une recommandation de suivre une formation, et cinq au remboursement des victimes.

Ailleurs au Canada, 30 décisions ont été rendues à l’encontre des courtiers, dont 23 au terme d’une entente de règlement avec l’ACFM. De ces décisions ont découlé : un blâme, deux amendes de moins de 10 000$, 15 amendes entre 10 000$ et 100 000$, quatre amendes de plus de 100 000$, une radiation temporaire, dix radiations permanentes, neuf nominations d’un surveillant, et deux interdictions d’ouvrir de nouveaux comptes. Quant aux dirigeants, 22 décisions ont été rendues à leur encontre, dont 18 au terme d’une entente de règlement avec l’ACFM. Ont découlé de ces décisions : six blâmes, trois amendes de moins de 10 000$, 12 amendes de plus de 10 000$, une interdiction d’exercer des activités liées aux valeurs mobilières, deux suspensions de l’autorisation d’exercer des activités liées aux valeurs mobilières, trois interdictions permanentes d’occuper un poste de direction, 13 interdictions temporaires d’occuper un poste de direction, une interdiction temporaire d’agir comme représentant, 11 obligations de suivre une formation et cinq assujettissements à une surveillance étroite. Enfin, 98 décisions ont été rendues à l’encontre de représentants, dont 42 au terme d’une entente de règlement avec l’ACFM. De ces décisions ont découlé : 14 amendes de moins de 10 000$, 49 amendes entre 10 000$ et 100 000$, 28 amendes de plus de 100 000$, 70 radiations permanentes, 15 radiations temporaires, sept interdictions temporaires d’agir comme vendeur de produits d’épargne collective, une interdiction permanente d’occuper un poste de direction, deux interdictions temporaires d’occuper un poste de direction, huit obligations de suivre une formation et deux remboursements aux victimes.

L’examen de ces décisions met en lumière que, de manière générale, l’ACFM impose beaucoup plus de sanctions disciplinaires, tant aux entreprises de courtage en épargne collective qu’à leurs dirigeants, comparativement aux organismes québécois. En ce sens, on constate qu’il y a, en proportion, moins de sanctions disciplinaires prononcées contre les courtiers exerçant au Québec, qu’ailleurs au Canada. De plus, les amendes imposées à ces acteurs sont généralement plus élevées ailleurs au Canada. Les sanctions de nature à restreindre de manière permanente le droit d’exercice du courtier sont également prononcées plus fréquemment à l’extérieur du Québec. De même, les organismes québécois rendent, en proportion, moins de décisions à l’encontre des dirigeants, et la nature des sanctions imposées de même que leur étendue sont, en tous points, moins strictes que celles prononcées ailleurs au Canada.

Pour ce qui est des représentants, mentionnons que le portrait est quelque peu différent. D’abord, le nombre de décisions rendu par les organismes québécois à l’encontre des représentants est supérieur en proportion à celui rendu par l’ACFM. On constate cependant que les sanctions rendues par les organismes québécois sont moins strictes, tant au regard du montant des amendes imposées que des restrictions au droit d’exercice, que celles rendues par l’ACFM. Par exemple, on note une préférence de l’ACFM pour des sanctions prévoyant une restriction permanente au droit d’exercice du représentant par opposition aux organismes québécois qui privilégient des sanctions de nature à restreindre ce droit de façon temporaire.

De même, notre analyse met en lumière que partout au Canada, les représentants, comparativement aux courtiers et aux dirigeants, sont les plus souvent sanctionnés, tant en nombre qu’au regard de la nature des sanctions. De même, les amendes imposées qui sont imposées aux représentants sont plus sévères que celles imposées aux courtiers et aux dirigeants, lorsque tel est le cas.

Partie IV – Réflexion d’ensemble sur l’encadrement disciplinaire des acteurs en matière de courtage en épargne collective

Cette analyse critique des régimes de sanctions disciplinaires auxquelles sont soumis les acteurs de l’épargne collective, au Québec et ailleurs au Canada, a permis de faire ressortir les points saillants de cet encadrement disciplinaire, tant sur le plan théorique que pratique, et de confirmer notre intuition quant à l’immunité légale et de facto, dont bénéficient les courtiers et les dirigeants au Québec, comparativement à leurs homologues ailleurs au Canada. En ce sens, l’encadrement moins étendu et moins strict de même que le peu de décisions ainsi que la faiblesse des sanctions rendues à l’encontre des courtiers et de leurs dirigeants au Québec, comparativement au reste du Canada permettent une telle affirmation.

Plusieurs facteurs sont en prendre en compte pour comprendre ces résultats, mentionnons notamment le fait que la récente réforme de l’inscription entrée en vigueur en 2009 nécessite une période d’adaptation avant de se concrétiser en sanctions disciplinaires de même que la possible politique ou pratique, pour les autorités québécoises comparativement aux autres autorités au Canada, à privilégier les poursuites pénales plutôt que disciplinaires. 

Tout en tenant compte de ces facteurs, il est à craindre que l’immunité dont peuvent bénéficier les entreprises de courtage et leurs dirigeants au Québec ait pour effet d’affaiblir les fonctions d’éducation et de dissuasion qui sous-tendent les régimes de sanctions disciplinaires. Le faible nombre de plaintes disciplinaires et l’imposition de sanctions trop clémentes risquent de ne pas inciter les entreprises et leurs dirigeants à faire preuve de diligence dans la surveillance et le contrôle de leurs représentants. Comment corriger cette situation? Certains pistes de réflexion méritent en ce sens d’être soulignés.

D’abord, rappelons que l’absence, au Québec, d’un organisme spécialisé comparable à l’ACFM de même que de normes déontologiques applicables de façon distincte aux courtiers en épargne collective et à leurs dirigeants constitue l’une des lacunes du système québécois. Partant, il pourrait être opportun de remédier à la situation. Outre l’intégration partielle de la réglementation de l’ACFM à la réglementation québécoise qui est en voie d’être amorcée, il y aurait lieu de se demander si la reconnaissance de l’ACFM à titre d’organisme d’autoréglementation spécialisé en épargne collective au Québec, comme ailleurs au Canada, ou encore l’élargissement des pouvoirs de la CSF aux courtiers et à leurs dirigeants sont des alternatives plus avantageuses que l’encadrement actuel.

De même, plutôt que de privilégier la voie pénale à la voie disciplinaire, il pourrait être opportun d’envisager la possibilité de porter les deux de front. Après tout, les recours disciplinaires ont leur raison d’être en ce qu’ils permettent de prévenir un éventail de comportements déviants beaucoup plus large, de la fraude à la simple négligence, et conséquemment prévoient un éventail plus large de sanctions comparativement au régime pénal.

En somme, les auteurs souhaitent que la présente étude de même que les pistes de réflexion qui s’en dégagent contribuent à éclairer les autorités d’encadrement à propos des améliorations à apporter en vue de minimiser le risque de comportements déviants dans le secteur du courtage en épargne collective au Québec. 

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CRÊTE, Raymonde, Cinthia DUCLOS et Frédéric BLOUIN,
(2012) 42 Revue générale de droit 267-446.
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